AVIS TRIMESTRIEL N°004-2017 (Octobre-novembre-décembre 2017)

Les médias jouent un rôle important dans la socialisation des populations, en  façonnant activement les images et les idées parties intégrantes de leur vie quotidienne. La liberté d’expression, reste un  acquis fondamental, qui ne dispense aucunement les professionnels de l’audiovisuel, de l’obligation de veiller à la moralité, à la valeur éducative, informative de leurs contenus.

Aucune forme d’expression démocratique ne justifie la diffusion ou la valorisation de propos, images, postures pouvant porter atteinte à la cohésion nationale, à l’intégrité du territoire et au  respect des institutions républicaines.

De plus, il est noté constamment, la diffusion d’images ayant un caractère particulièrement violent à des heures de grande écoute, de nature à heurter la sensibilité du public, en particulier celle des jeunes. En outre, la publicité à l’avantage de « guérisseurs traditionnels » supposés qui devient une pratique récurrente, désormais systématisée dans certaines émissions de télévision, en violation manifeste de la règlementation en vigueur.

La programmation de contenus audiovisuels doit rigoureusement prendre en  considération les valeurs fondatrices de notre société dans toute sa diversité. Les titulaires d’une autorisation de diffusion de programmes audiovisuels doivent respecter les dispositions auxquelles ils ont librement souscrit à travers les cahiers de charges.

Le Collège du CNRA, réuni en sa séance du 04 janvier 2018 et après en avoir délibéré, rend public le présent avis sur les faits constatés et répertoriés au cours du dernier trimestre de l’année 2017.

I. ÉCHANTILLONNAGE

Durant la période du 1er octobre au 31 décembre 2017, le service de monitoring a procédé à un échantillonnage portant sur 1545 contenus audiovisuels selon les critères suivants : langue utilisée, format des programmes, la thématique abordée, l’utilisation de la signalétique.

1. Les Radios

Le  monitoring a suivi 578 émissions diffusées sur les stations de radio en mode FM.

a) Répartition des langues dans les émissions de radio

Sur l’ensemble des radios de notre échantillon, le wolof  est la langue la plus usitée. Il est le support de 64,71 % des programmes, devant le français qui fait  35,29 %. Certaines émissions sont diffusées dans les deux langues.

b) Répartition des émissions de radio suivies, selon la thématique

Les émissions d’information sont les plus représentées avec 431 contenus recensés.

c ) Répartition des émissions de radio suivies, selon le format

Le   « Journal Parlé » représente 72,84 % de l’ensemble des formats des émissions de notre échantillon

2. Les Télévisions

Les services du monitoring ont suivi 967 émissions de télévision.

a ) Répartition des langues dans les émissions de télévision

Comme ce qui a été observé pour les radios, le « wolof » est la langue la plus usitée dans les émissions de télévision, avec un pourcentage de 47,78 %, devant le  français utilisé dans 43,22% des émissions. Il y a également  un mix des deux langues dans certaines émissions.

b ) Répartition des thématiques dans les émissions de télévision

A l’instar de ce qui a été observé pour les radios, les émissions d’information, avec 801 relevés, sont les plus représentées.

c ) Répartition des émissions de télévision suivies, selon le format

Sur les chaînes de télévision, tout comme à la radio, le « Journal » occupe une place importante, avec 62,15 % de l’ensemble des émissions recensées.

II. DYSFONCTIONNEMENTS ET MANQUEMENTS

Au cours du quatrième trimestre de l’année 2017, les dysfonctionnements et manquements constatés ont trait aux points ci-dessous énumérés

1. Enfance & Adolescence (40,91 %)

  • Programmation à des heures indues de contenus à  caractère violent et/ou inapproprié sans signalétique.
  • L’évocation continue de thèmes insoutenables liés à des faits divers, comme le viol et  l’infanticide, tout en les amplifiant par des commentaires et/ou plaisanteries complètement inappropriés.

Dans les émissions radiophoniques de faits divers,  c’est toujours la course au sensationnel, à l’inédit au détriment des différentes sensibilités, sans aucune précaution.

2. Éthique et Déontologie (36,36 %)

  • Non-respect de la vie privée, de l’honneur et de l’intégrité de la personne humaine.

Diffusion de témoignages, révélations et/ou accusations portées par des personnes supposées victimes d’actes répressibles par ailleurs.  

  • Incitation à des comportements discriminatoires en raison de la nationalité.

Des médias, traitant du sujet de la mendicité, ont tendance à stigmatiser certains étrangers.

3. Publicité (18,8 %)

  • La profusion d’émissions télévisées exclusivement dédiées à la publicité en faveur de prétendus guérisseurs en violation des dispositions de l’article 10 du décret n°67-147 du 10 février 1967 instituant le code de déontologie  médicale  qui  interdit  toute  forme  de  publicité  dans  le  domaine médical, de la loi relative à la publicité et des cahiers des charges.

Pour précision, la diffusion de programmes, offrant une tribune à des personnes qui seraient capables de guérir toutes sortes de pathologies, constitue une violation grave du code de déontologie médicale et de la loi sur la publicité.

4. Image de la femme (4,55 %)

  • La diffusion d’images dévalorisantes de la femme notamment dans les séries télévisées.

Le conflit social, la rupture conjugale restent les déclencheurs d’intérêts dans la majorité des fictions. Les femmes y sont représentées dans des situations systématiquement conflictuelles, en dehors de toute communion sociale.

 

III. RECOMMANDATIONS

Face à de tels  manquements, qui constituent des violations de la réglementation en vigueur au Sénégal dans le domaine de l’audiovisuel, le Conseil national de Régulation de l’Audiovisuel fait les recommandations énumérés ci-dessous.
1. Veiller à la sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence, à la protection des mineurs dans la programmation audiovisuelle. Cette exigence légale est confortée par les stipulations des cahiers des charges des radios et télévisions.
Certains programmes audiovisuels pouvant troubler les enfants de -12 ans, ne doivent pas être diffusés avant 22h, notamment lorsque le scénario recourt à la violence physique ou psychologique, à la représentation d’actes sexuels.
2. Faire preuve de rigueur et de professionnalisme dans la vérification, le traitement, la présentation et la diffusion de l’information surtout dans la couverture de faits divers.

Les médias, dans leurs activités quotidiennes, doivent scrupuleusement rester attachés aux principes éthiques et déontologiques, qui gouvernent l’exercice du métier de journaliste.

3. Éviter de servir de relais à des individus dépourvus de toute qualification légale et dont la promotion expose des populations non averties à des risques de détérioration de leur santé.
4. S’abstenir de diffuser des images, de faire la promotion de propos ou d’actes susceptibles de porter atteinte à la dignité et à l’intégrité sociale de la femme.

                                           Le Collège des Conseillers du CNRA

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